Il y a vingt ans mourait brutalement Jean-Jacques
Bourgois. Il laissait derrière lui une œuvre inachevée,
mais que ne ternissent ni le deuil, ni la subordination au temps. Acte
de création recommençant sans cesse une lumière exempte
de tous les faux jours, cette démarche picturale réclamait
un tombeau : il était clair cependant à Michel Couturier,
Benoît Vantomme et moi-même qu'il convenait de célébrer
la mémoire du disparu en se dessaisissant de ses constellations et
des ses gemmes, seule façon de s'évader des hommages convenus.
Le peintre n'avait-il offert dans ses tableaux l'expérience vertigineuse
d'une pensée qui se retourne contre elle-même? A ses débuts,
il avait adopté les lois de l'abstraction, puis il avait soudain
compromis la fiabilité de son choix de jeunesse dans un questionnement
du visible, se heurtant alors malgré lui aux signes qui réfractent
celui-ci.
Et c'est pourquoi l'idée nous est venue de faire un film, pour traduire l'idée du potentiel de composition chez le peintre. Ayant élu dans le grenier où les dessins, les toiles du mort se conservent depuis si longtemps le motif de fond mural qui décore cette grande pièce endormie, nous en avons fait l'ornement d'un drapeau qui paraîtra dans ce film : il s'agit d'un palmier, et quand on sait que Jean-Jacques Bourgois voyagea en Algérie, un tel motif s'explique de soi, cet arbre veillant en effet sur le désert de l'esprit. (...) Texte (extrait) : Aldo Guillaume Turin - Photos (cliquer pour agrandir) : Gauthier Bourgois. Exposition : "World Wide Flags - Drapeaux d'artistes 2003" - Bord de Meuse, Liège, Belgique. |